Militer au boulot et défendre ses convictions, mission impossible ? Pas pour les personnes que nous avons interrogées ! Voici leurs techniques discrètes, mais non moins efficaces pour convaincre tous vos collègues.
Face à Jean-Mi « Ahlala-les-féministes-ces-rabat-joie », difficile de retenir le flot militant qui tambourine dans votre poitrine et ne demande qu’à sortir, haut et fort, pour noyer le malotru et enterrer ses idées nauséabondes.
Problème : vous êtes sur votre lieu de travail, où bienséance et calme olympien semblent garants de votre maintien en poste. Pas de panique ! Les personnes que nous avons interviewées vous livrent leurs trucs et astuces pour éduquer vos collègues sans risquer votre carrière.
Identifier ses alliés pour militer au boulot
Que ce soit à la , au déjeuner, ou en réunion virtuelle, tendez l’oreille : les langues peuvent se délier et vous donner ainsi une idée de votre interlocuteur ou interlocutrice, et de la sauce militante à laquelle le ou la déguster.
Sheila, conseiller·e clientèle de 27 ans , a pris soin d’analyser ses collègues avant tout plongeon dans le grand bain du militantisme en milieu professionnel. « Et j’ai bien fait », rit-iel, « j’ai pu identifier les collègues avec lesquels je dois particulièrement prendre des pincettes pour ménager leur égo, et éviter la porte en cas de conflit ».
Apprendre à connaitre ses collègues, c’est également pouvoir identifier d’autres personnes concernées ou d’éventuels alliés, personnes clés pour donner de la voix à vos sujets. « Seul·e, j’avais un peu peur de mettre certaines problématiques sur la table, ou de reprendre mes collègues », illustre Sheila, « depuis, j’ai trouvé deux alliés qui appuient mes demandes, reprennent à ma place ou expliquent que le propos n’était pas correct quand le collègue visé se rebiffe ». Lea conseiller·e explique percevoir un regain de légitimité via cette technique, et se sait de fait soutenu·e.
Il aura fallu un an, mais aujourd’hui, Sheila connait ses alliés sur son lieu de travail, ainsi que ses collègues ouverts à la discussion et à une éventuelle évolution en faveur du respect de chacun·e. « Pour les autres, je me dis qu’in fine, lorsque la majorité aura évolué dans le bon sens, ils n’auront pas d’autre choix que de suivre le mouvement ou de partir », explique Sheila dans un haussement d’épaules.
« Je crois que la clé, c’est d’y aller étape par étape », plussoie Léa, 22 ans, chargée de communication dans le BTP, « il faut accepter qu’on ne change pas la boite en un claquement de doigt, qu’il faut user de beaucoup de pédagogie là où tu as envie de mettre des claques, et accepter que tout le monde ne soit pas au même niveau de déconstruction que toi pour s’adapter au niveau de chacun en mettant son jugement de côté ».
On ne naît pas déconstruit, on le devient. Et pour certaines personnes, le chemin peut être plus ou moins long. Alors, pour éviter le conflit et ménager sa monture, Agathe a la solution.
Techniques de sioux pour militer sans en avoir l’air
Agathe est journaliste, et si nombre de médias abordent aujourd’hui ces sujets relatifs aux multiples discriminations qui minent l’actualité de notre pays, en backstage au cœur du milieu journalistique, le trouve encore difficilement sa place. Alors, pour se faire entendre, Agathe joue parfois les ingénues.
Lorsqu’on lui reproche d’être « trop engagée », « trop militante » sur son lieu de travail, la journaliste questionne innocemment : « Ah bon, mais pourquoi ? Est-ce que tu peux m’expliquer, s’il te plait ? Je ne comprends pas ». « Ça marche super bien, parce qu’en face, il n’y a tout simplement pas d’argument », rit-elle.
Cette technique de militantisme undercover semble faire l’unanimité. « En posant des questions a priori innocentes, on pousse notre interlocuteur ou interlocutrice à se poser des questions en effet miroir, à réfléchir et à faire le cheminement pour se rendre compte que, bon, finalement, sa logique n’était pas si bonne », explique Sheila, « et bien souvent, ça ouvre un dialogue plus apaisé et égalitaire ». Zéro conflit, 100% safe pour sa carrière, on dit banco !
Vous avez désormais converti la majeure partie de vos collègues, mais souhaitez inscrire vos avancées dans une belle charte signée de la plume de votre comité de direction, afin d’assurer des lendemains qui chantent aux générations futures ? C’est par ici que ça se passe.
Quand le respect est « bankable »
Si les règlementations relatives à la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) sont venues quelque peu bousculer ces dernières, le champ d’action semble cependant toujours bien limité. « En France, on se limite à l’égalité femmes-hommes et un peu au handicap », détaille Laura, cofondatrice de l’agence Projet Adelphité, « pourtant, les politiques menées aux États-Unis en matière de diversité au sens large ont des effets positifs en termes de résultats économiques ».
Un argument qui peut faire son petit effet, comme en témoigne Julien, membre du comité de direction d’une grande entreprise dans le secteur du textile. Le cadre de 59 ans explique avoir longtemps mis de côté ces sujets car « pas une priorité », « pas le temps », avant de se retrouver face à l’une de ses salariées, Powerpoint affiché sur sa tablette et surtout, chiffres à l’appui.
« Elle a utilisé les codes de l’entreprise pour me montrer que les sujets militants avaient leur place ici, autant qu’à l’externe, et faisaient partie intégrante des priorités de nos jeunes travailleurs », souligne Julien, « j’en ai parlé à mes filles, qui m’ont passé un savon et m’ont expliqué qu’en refusant de voir la réalité en face, je faisais une grosse erreur stratégique. Ça m’a mis un sacré coup ».
Eh oui, aussi étonnant que cela puisse paraitre, il semblerait, , qu’inclusion et diversité favorisent le bien-être au travail, et donc performance. Incroyable ! (Non). « J’ai envie de me sentir bien dans l’endroit où je passe le plus clair de mon temps, et d’y partager mes valeurs », confirme sans surprise Léa, pour les derniers sceptiques au fond de la salle.
Et si Jean-Mi n’a toujours pas changé d’avis après l’usage de toutes ces techniques et la mise en place d’une politique inclusive sur son lieu de travail, il ne nous reste plus qu’à lui souhaiter des bugs informatiques à répétition, car si ça se trouve son ordinateur est tout aussi obsolète que lui…
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