Manque pas d’air le Breton !

Pfiou, j’ai lu le dernier écrit du Breton avant-hier soir. C’est bien simple, j’suis restée sans voix et croyez-mouâ il en faut pour m’couper la chique ! Il m’a fallu tout c’temps pour digérer et m’remettre au clavier. J’ai cogité dur et pas arrêté d’tourner en rond, vous pouvez-m’croire.

Bon, j’imagine que sa journée avait du être perturbante. Faut lui laisser qu’partir comme ça, vers l’inconnu, franchement j’souhaite ça à personne – même pas à Adolph, et pourtant j’serais pas mécontente qu’il parte en Bretagne c’t’animal-là. C’est vrai ça, le p’tit frère il avait des copains là-bas. Et hop, d’un coup on le met dans un train et il débarque chez des gens qu’il ne connaît ni des lèvres ni des dents1. Vous savez c’que j’ferais mouâ si on m’faisait un truc comme ça ? Mode chat ninja, j’disperse, j’ventile et ça finit avec un bourre-pif et pissétout ! Ah… C’est c’qui m’est arrivé quand j’étais p’tite et que Pôpa et Môman y sont v’nus m’chercher ? Z’êtes sûrs de ça ? Si vous l’dites… Mais c’était pas pour aller si tant loin quand même. Bref, j’veux bien croire qu’il était déboussolé le p’tiot quand il a écrit, mais c’est quand même pas une raison pour traiter l’monde comme il l’a fait… Nikta M… il m’a appelé c’morveux ! C’est là qu’on voit qu’il y a un reste de chat des rues chez lui. Quel langage mes aïeux !

Qui ose dire que j’l’ai bien cherché en l’appelant Persil Plat ? C’est pas pareil, mouâ j’rigolais hein ! Pis j’suis plus vieille que lui donc j’ai l’droit, j’ai décidé ça en parfait accord avec mouâ-même na. J’pensais pas qu’ça allait l’énerver à c’point-là quoi. Va falloir que j’lui apprenne l’humour nikitien à c’jeune noir-bec – c’est comme un blanc-bec, mais quand le sujet est noir. Mouarfff, elle est bonne celle-là, j’me la note pour la r’placer. Mais le pire dans tout ça, c’est qu’il a fait mouche avec son surnom… J’étais vexée comme un vieux pou et j’ai fait la trogne pendant des heures, surtout quand mes zhumains y z’ont dit qu’c’était bien fait pour mouâ. J’aurais bien voulu m’en tamponner l’coquillard, mais nada, j’ai pas pu. Nikta M… J’l’ai toujours en travers du gosier… M’dire ça à mouâ… Heureus’ment qu’les zautres chats du quartier c’est pas de geeks qui vont lire sur internet, sinon je s’rais finie. Après avoir réfléchi en boudant, j’ai pas trouvé cinquante solutions. Faut que j’négocie avec le ptiot car quand il s’ra ici et qu’il aura l’droit d’sortir, il va aller claironner ça sur tous les toits. La honte serait tellement sur mouâ que j’aurais plus qu’à me terrer au fond d’la maison jusqu’à la fin d’ma vie. Une réputation ruinée tout ça parc’que l’chaton il a pas d’humour. Ce s’rait trop bête.

Je m’adresse donc solennellement à Persil Plat heu… Parsifal. Je m’excuse – ouh que c’est dur à écrire – et j’le f’rai plus – ou alors juste un p’tit peu et que si tu es d’accord. Faut quand même pas qu’j’en fasse trop, il s’prend d’jà pour un dieu… Y’en a qui n’doutent de rien j’vous jure. Est-ce que j’me prends pour c’que j’suis pas mouâ hein ? Non, je suis juste une chatte lettrée très intelligente et spirituelle qui risque d’entrer un jour à l’Achadémie Française mais c’est tout !

Sinon quoi d’autre ? Ben pas grand-chose, vu qu’j’ai boudé dans mon coin. Ah si, Pôpa il a descendu un gros truc tout moche du grenier tout à l’heure. Ça r’semble vaguement à une peute bête aboyante mais c’est tout mou, pas vivant et poussiéreux – ça n’arrange pas mon rhumes des foins que j’ai. V’là qu’Môman s’est mis dans la tête de l’nettoyer pour le donner au p’tit frère. J’voudrais pas être médisante, mais si mes souv’nirs sont bons, Chanibal était tAttentionisé par c’truc, même que l’jeune deux pattes il l’avait mis dans l’entrée d’sa chambre pour pas qu’il y aille. Elle a des drôles d’idées Môman franchement. Mouâ on m’donne un truc pareil, j’en fais d’la charpie et pissétout. J’lui offre un aller simple au paradis des faux chiens déniapés2. R’marquez si les vrais m’embêtent, j’les déniape aussi et j’interdis qu’tout être – zhumain ou animal – ose dire que j’partirais sans d’mander mon reste en prenant mes pattes à mon cou. Ce n’est qu’une légende rurale.

Même pas eu l’cœur à suivre l’actualité, c’est dire si j’suis pas bien. Bon, maint’nant j’espère que l’Per… Parsifal y va être cool et arrêter ses médisances à mon égard hein. C’est une patte tendue ce message, en signe de paix. Patte blanche cherche patte noire, pour amitié et plus si affinités – ah non, faut pas déconner, j’tiens à ma vertu mouâ –, enfin pour vie de famille harmonieuse et pleine de zénitude.

J’vous jure j’ai rien fumé d’illégal, pourtant quand j’me relis j’trouve qu’y a un truc qui cloche. C’est mouâ qu’y ai écrit ça ? J’suis pas bien, j’vous l’avais dit… À la revoyure tout l’monde.

Nikita

1Pour « ni d’Eve, ni d’Adam ».

2Déniaper : v.tr. déchirer, déchiqueter en patois franc-comtois.