Allez savoir comment j'ai raté cette information, mais il existe des faux testicules pour poser sur son chien (je ne pensais pas un jour écrire cette phrase). Les machins sont en

Allez savoir comment j'ai raté cette information, mais il existe des faux testicules pour poser sur son chien (je ne pensais pas un jour écrire cette phrase). Les machins sont en silicone ou en polypropène et se posent après la castration. Cela s'appelle des Neuticles et l'entreprise qui les fabrique depuis 18 ans en aurait "installé" sur un demi-million de chiens, pour la modique somme de 310 dollars en moyenne. Leur inventeur a d'ailleurs gagné un IgNobel de Médecine en 2005. Sur le brevet déposé aux débuts de ce juteux business, on peut lire ceci :

"Les commentaires d'inconnus qui se trompent sur le genre de l'animal peut exacerber l'inconfort de ce dernier."

Car c'est bien connu, les chiens comprennent tellement bien le langage humain qu'ils sont offensés quand on les traite de chiennes (sont-ils malheureux quand on est en chien, ou quand il fait un temps de chien ? On ne saura pas). Notons au passage que dans ce louable effort visant au bien-être animal, l'inventeur laisse complètement de côté les chiennes qui seraient malencontreusement prises pour des chiens : s'agirait-il donc d'une promotion sociale, propre à exacerber la fierté de la chienne ? Doit-on au contraire, condamner cette indifférence envers les souffrances des chiennes mal identifiées dans l'espace public ? (Cette question est rhétorique puisque d'autres entreprises féminisent les chiennes, à coups de perruques, extensions capillaires et bandeaux. La taxe rose n'est donc pas réservée aux humains.)

Evidemment, cette anthropocentrisme pourrait faire rigoler. Les commentaires clients valent leur pesant de cacahuètes (ou de noix de pécan, vu le sujet) : "c'est un garçon et je voudrais qu'il continue de ressembler à un garçon" - "Vous voulez dire que pour vous, le pénis n'est pas suffisant ?".

Dans cet intéressant exemple d'insécurité virile, on note pas mal de similarités avec la condition humaine : sans testicules, tu cesses automatiquement d'être un mâle. Avoir des testicules factices permet de "corriger" une castration réelle (du coup, les apparences de la vrilité comptent plus que l'intégrité physique). Mais outre que ça ne doit pas faire marrer les labradors et autres épagneuls au moment de passer sur le billard, cette obsession pour la présence de testicules - de préférence volumineux - se retrouve dans nos obsessions 1) pour les hommes solidement montés, perçus comme plus virils, 2) pour le trouble dans le genre vécu comme un malaise social.

Car quelle est l'autre population qui se voit genrer de force ? (Et pas seulement sous la contrainte molle de la culture et du capitalisme - auquel cas nous sommes tous concernés ?) Quelles sont les autres créatures que nous souhaitons protéger des terribles "commentaires d'inconnus" ? Les bébés. Pour l'instant, ce sont surtout les bébés filles qui se voient obligées de se différencier du masculin-neutre (avec les mêmes outils que pour les chiens, soit dit en passant : perruques, bandeaux, maillots de bain une pièce pour des nouvelles-nées, et même petites chaussures à talons en mousse). Mais finalement, pourquoi en rester là ? Ne serait-ce pas HORRIBLE si quelqu'un confondait votre bébé mâle avec un bébé femelle ? Malgré l'absence de souvenirs avant trois ans, ne serait-ce pas la source de futures NEVROSES ? Et si le bébé devenait gay ? Queer ? Trans ? Asexuel ? Masochiste ? Vegan ? Hindouiste ? Pianiste ? Comptable ? Motard ?

Du coup, je propose la pose de Neuticles sur tous les bébés mâles humains. Pour leur bien. Pour le bien des parents. Et pour le bien de notre civilisation. 

(Et la prochaine fois que j'entends quelqu'un se plaindre des excès de la théorie du genre, je ne manquerai pas de ressortir les excès de la culture genrée. On rigole bien, au pays des insécurités...)