C’est avec des accents très

 

C’est avec des accents très solennels que des membres du Next 40 annoncent leur intention de « mobiliser toutes nos énergies pour une reprise économique rapide. Il en va de la responsabilité des acteurs économiques et politiques français.» Ils lancent l’appel dans une tribune publiée parl’Opinion . Le Next 40 ? « 40 start-up non cotées, ayant leur siège en France, et jugées par BpiFrance comme ayant le meilleur potentiel de croissance. » BpiFrance est la banque publique d’investissement française qui décide de soutenir ou non une entreprise. Et ce sont rarement des entreprises dirigées par des femmes, ces entreprises ayant aussi du mal à trouver des fonds privés. (Lire : Pas d’argent pour les entreprises des femmes )

Que veulent ceux qui se flattent de diriger des « pépites parmi les plus prometteuses » ? Le soutien des entreprises du CAC 40 (pas plus ouvert aux femmes dirigeantes). « Nous appelons à réunir solidité et capacité d’investissements, d’une part, et innovation de rupture et audace, d’autre part, à travers un projet porteur d’espoir : rassembler les énergies des entreprises du Next 40 et celles du CAC 40 pour en faire ensemble les catalyseurs d’une reprise ambitieuse au service de la compétitivité française et de la souveraineté européenne.» Autrement dit, une « coalition des 40-40 » exprimée parfois avec des métaphores hasardeuses : « cette coalition doit constituer un point de départ dont l’écume irriguera toute la société, autour d’une aspiration à l’innovation, au service du plus grand nombre. » 

Et le « care » l’économie du soin ? Il n’en est pas question. Et ce ne sont probablement pas les entreprises du CAC 40 qui mettront le sujet sur la table. La crise sanitaire a pourtant mis en évidence la nécessité de remettre à plat l’économie du soin. Le « rebond sociétal » serait pourtant bien inspiré de prendre son élan à partir de la société du soin, de l’équilibre, de la restauration des ressources ainsi que le préconise la « théorie du Donut » ou ce « plaidoyer pour une économie féministe. » Mais dans les cercles de 40 + 40 , on ne voit pas ces idées-là. On pense croissance économique, avec un peu de peinture verte mais sans trace de « care ».

L’appel du boy’s club qui signe la tribune dessine un « monde d’après » assez similaire au monde d’avant. Mais, probablement, en associant davantage les grands frères du CAC 40 au financement des entreprises des petits gars du Next 40 qui, semble-t-il, tremblent un peu. Le 4 juin, le quotidien économique Les Echos annonçait : « L’Etat débloque 1,2 milliard d’euros supplémentaires pour soutenir la French Tech », l’objectif était de contrer d’éventuels rachats de start-ups françaises en difficulté par des entreprises étrangères. La tribune plaide pour que « les capacités d’investissement » de la France et des entreprises françaises s’orientent vers les entreprises du boy’s club. Mal parti pour une économie féministe.

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